Avis sur le livre : Crac
Crac ressemble à une suite du Traquet kurde (P.O.L, 2018), le précédent ouvrage de Jean Rolin, qui se mettait sur les traces d’un oiseau du même nom aperçu du côté du puy de Dôme, en mai 2015. On y croise presque autant de piafs, et un figurant du Traquet kurde, T. E. Lawrence (1888-1935), a été promu au rang de personnage central. Jean Rolin, ici, met ses pas dans ceux du futur Lawrence d’Arabie qui, à 21 ans, se lança, en plein été, dans une marche de presque 1 800 kilomètres à travers le Moyen-Orient pour visiter les châteaux médiévaux, sujet de sa thèse de fin d’études. S’appuyant sur la correspondance de Lawrence, un peu comme celui-ci se fiait à son guide Baedeker, l’écrivain arpente, en 2017 et 2018, une région qui cesse rarement, depuis une quarantaine d’années, d’être le théâtre de conflits, ainsi qu’en témoignent les châteaux de Beaufort, au Liban, ou, en Syrie, le Crac des chevaliers. Reportage sur les lieux autant que dans les textes, Crac poursuit la méditation de Jean Rolin autour de la place des guerres dans l’histoire, et sur l’impermanence du monde, sans se départir de son sens de l’autodérision ni de la beauté proustienne de ses phrases.
Raphaëlle Leyris, Le Monde des Livres