Avis sur le livre : Le syndrome du varan
La narratrice s’est longtemps « vue comme un varan » : « Une tête aux yeux plissés, un komodo épuisé et haletant, à moitié sorti d’une purée primordiale, la gueule encroûtée de boue et de vieux sang. » Parce que, pour survivre, elle s’est endurcie jusqu’à ne rien ressentir (« Enfin, si, quelque part dans un espace auquel je n’ai pas accès, je sens », précise-t-elle). Le Syndrome du varan fait la généalogie de cet entraînement à l’anesthésie, en remontant dans son enfance, entre une mère « folle » et un père qui « n’est rien qu’un manque égoïste et infantile ». Deux parents violents, pervers, deux « abrutis » qui ont consciencieusement saccagé leur fille, ensemble puis chacun de son côté. D’un souvenir à l’autre, Justine Niogret laisse éclater la rage sèche, teintée d’amère ironie, de sa narratrice, effarée de ce qu’elle a traversé, et d’y avoir survécu. Ecrivaine reconnue de fantasy, Justine Niogret signe un roman suffocant. R. L.
Le Monde