Clémence et l'Hypothèse de la beauté
Est-on jamais assuré de la beauté des corps, de la beauté des oeuvres ? Est-elle la cause de notre désir, ou le masque destiné à en dissimuler le véritable but ? Pourrait-elle être aussi une hypothèse de roman ? C'est en effet un romancier, Gabriel, qui demande à un de ses amis, Marc, d'observer pour son propre compte une jeune et belle femme, peintre de surcroît, qui vit à la campagne. Marc accepte d'autant plus volontiers que, poussé hors de la vie active par une mise à la retraite anticipée, il sait qu'habite non loin de là Jeanne, une de ses anciennes amies. Ainsi la beauté, celle de Clémence ou de son oeuvre, serait-elle affirmée ou supposée comme à l'intersection des relations entre les quatre personnages, les gouvernant à leur insu. Marc, quant à lui, écrivant à Gabriel des lettres qu'il n'envoie pas, se défend d'en subir le pouvoir. Comme le récit adopte le point de vue de Marc, ce conflit, qui s'inscrit dans la construction même des phrases, en détermine l'intrigue : le désir d'une vie de l'esprit et ses inévitables impasses. Après Personnages dans un rideau, en 1991, Jean-Louis Baudry prolonge ici ce qu'on pourrait appeler une analyse poétique de la vie intérieure.