Les Aubes
Après un suicide manqué, le narrateur, un jeune homme de vingt-cinq ans, a perdu la vue. C'est à travers le récit fait à Véga, sa lectrice devenue son amante, que nous découvrons l'histoire de son enfance, marquée par l'obsession de la mort volontaire et par la souffrance devant le spectacle de la guerre qui oppose son père, un peintre raté, à sa mère, une riche héritière au tempérament de feu. Tout n'aurait été qu'amertume si, à dix ans, le narrateur n'avait fait la rencontre d'une femme singulière, une créature éthérée et solitaire, une anorexique dont le dégoût pour la nourriture n'a d'égal que sa boulimie d'études. Il l'appelle Forever. Elle lui enseigne la passion de l'idéal, l'entraîne dans sa quête de l'absolu et lui fait découvrir les oeuvres d'un écrivain, "la romancière autrichienne morte à Rome dans des conditions mystérieuses". Ces trois femmes (Véga, la figure de l'amour retrouvé. Forever, l'incarnation de l'idéal perdu et la romancière autrichienne, le modèle de l'éternel écrivain) sont comme les trois Grâces qui accompagnent le narrateur vers la rédemption : sauvé de la mort, c'est à la rencontre de la vie et de la littérature qu'il part. Et le livre que nous lisons est celui-là même qu'a rêvé le jeune homme depuis l'adolescence et que, devenu aveugle, il dicte à sa compagne. Après une trilogie dominée par le deuil, la folie et la mort, celle du père, Linda Lê a choisi d'explorer une nouvelle face de son univers, plus sensuelle, plus charnelle. En un mot, plus lumineux. "Je rêve, Vega, je rêve d'un livre dont je te dirais chaque jour des fragments que tu coucherais sur le papier. Je rêve d'un livre rempli du murmure des fantômes, un livre comme un hymne à la gloire de Forever, la très sainte, comme une déclaration d'amour fou faite à toi, la conjurée qui a ourdi mon bonheur. Je rêve d'un livre de deuil et de renaissance, de mort et de sensualité, un livre qui me sauverait de moi, que la pensée du suicide a toujours accompagnée."