La Joie d'Aurélie

Auteur : Patrick Grainville
Editeur : Seuil

Un meurtre a été commis dans une grande demeure des Pyrénées espagnoles : jaloux, le mari de Jennifer a tué son amant, un romancier célèbre. Puis le couple a fait disparaître le cadavre dans la rivière voisine. Le crime n'a jamais été élucidé.

Quarante ans plus tard (en 2040), dans le même lieu, Aurélie va fêter ses cent ans, entourée de toute sa famille. Aurélie est une ancienne ethnologue qui n'a jamais eu froid aux yeux ni sa langue dans sa poche. Elle a longtemps bourlingué à travers le monde, connu le grand amour avec Allal, un mercenaire marocain exerçant ses talents au Zaïre dans les années 70 et qui sera assassiné par ses employeurs. Puis, Aurélie a épousé Marc. Né de cette union sans passion (à laquelle Marc n'a pas survécu), Paul a épousé Manon et tous deux ont eu Loïc, 20 ans, que sa grand-mère adore. Aurélie a une sœur, Mélanie, ancienne psychologue, de dix ans sa cadette, avec laquelle elle ne cesse de se quereller. C'est pourtant Aurélie qui a permis à sa sœur célibataire d'adopter Ludivine, une petite vietnamienne qui épousera Aimé, un Antillais avec lequel elle aura Ariane.

Voilà donc la famille réunie pour fêter l'aïeule avec Fatou, une belle Malienne de 20 ans qui s'occupe d'Aurélie, Nicolas qui gère une réserve naturelle et protège une meute de loups, et enfin, Maher, un passeur d'immigrés, qui est devenu l'amant de Fatou (évinçant Nicolas auquel le rôle était jusqu'alors dévolu).

Et voici que survient Esther, la fille que Jennifer a eue quarante ans plus tôt avec son amant, le frère disparu d'Aurélie et de Mélanie, marié à la douce Emma que ses belles-sœurs ont recueillie. Esther a jusqu'à présent vécu heureuse, réussissant dans son métier (elle construit des ponts). Mais, à la mort de son "père de substitution", sa mère lui a appris la vérité sur sa naissance. Esther arrive dans sa seconde famille "pleine de douleur et de colère. De haine. " Elle voit en Aurélie et sa descendance des proies qu'elle ne sait comment détruire. Le veut-elle vraiment, d'ailleurs ? Elle comprend peu à peu que sur eux tous pèsent des manques, des peurs, des secrets dont le dévoilement peut blesser, mais aussi des rêves, des désirs. Chacun est tout à tour prédateur et proie. (Et, en ce sens, l'histoire métaphorique de la meute de loups s'intègre tout naturellement au roman.)

Sous le regard d'Aurélie, qui croit en "la sérénité de la violence" et y trouve sa joie, (ce qui la conduit à une mémorable algarade avec Mélanie), la colère, les tensions et les convoitises s'attisent avant de s'estomper peu à peu. Et la maison hantée par la culpabilité va devenir le lieu où, de la mort et de l'angoisse, peuvent naître l'amour et la joie, "la vie comme un feu splendide". Alors la centenaire, restée seule, pourra se laisser glisser dans l'eau de la rivière, accomplir sa dernière prouesse.

19,30 €
Parution : Janvier 2004
272 pages
ISBN : 978-2-0206-2775-7
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