Histoire du corps: coffret 3 volumes

Tome 1, De la Renaissance aux Lumières ; Tome 2, De la Révolution à la Grande Guerre ; Tome 3, Les mutations du regard - Le XXe siècle
Auteur(s) : Alain Corbin, Jean-Jacques Courtine, Georges Vigarello, Collectif
Editeur : Seuil

1 - Le corps est devenu un objet d'histoire, car tributaire, dans ses formes et ses mises en scène, de conditions matérielles et culturelles qui varient. C' est l'émergence du corps " moderne" qu'évoque d'abord ce livre - un corps dont les attributs sont imaginés indépendamment de l'influence des planètes, des forces occultes ou des amulettes. Non que disparaissent, loin s'en faut, les références sacrées. Mais un conflit de culture s'avive avec la Renaissance où le corps se singularise dans toute son autonomie. À quoi s'ajoute un intense travail de la modernité sur les frontières du soi, les pulsions, les désirs: contrôle des politesses et des sociabilités, polissage des violences, autosurveillance des gestes dans l'univers de l'intime. Une accentuation des affranchissements individuels balance une accentuation des impositions collectives.
2 - Le corps occupe un lieu dans l'espace. Il est lui-même un territoire qui possède ses enveloppes : la peau, le halo sonore de sa voix, l'aura de sa respiration. Ce corps physique, matériel, peut être touché, senti, contemplé. Les savants le manipulent et le dissèquent. Ils mesurent sa masse, sa densité, son volume, sa température. Ils analysent son mouvement. Ils le travaillent. Mais ce corps des anatomistes, des physiologistes et des gymnastes diffère radicalement du corps qui souffre et qui jouit. Or, le plus souvent, les historiens se sont montrés oublieux de la tension instaurée entre l'objet de science, de travail, le corps productif, expérimental, le corps inclus dans l'univers technico-scientifique contemporain et le corps qui éprouve le plaisir ou la douleur. C'est le rétablissement d'un équilibre entre ces deux perspectives qui est tenté dans ce livre. Le long XIXe siècle dont il est ici question était en outre suffisamment riche de novations pour justifier que l'accent fût mis sur des processus aussi actifs que l'emprise de la médecine anatomo-clinique et de la phrénologie, l'avènement de l'anesthésie, l'élaboration d'un imaginaire de la relation charnelle, l'émergence de la sexologie, l'essor de la gymnastique et du sport, l'apparition de nouvelles machines imposée par la révolution industrielle, ou le dessin de nouvelles représentations sociales du corps.
3 - Jamais, avant le XXe siècle, le corps humain n'avait connu de tels bouleversements. Ces profondes transformations, ressenties à même la chair, sont tout autant mutation des regards qu'on a portés sur lui. Le déplacement du rapport entre santé et maladie, corps normal et corps anormal, vie et mort dans une société médicalisée de part en part; le relâchement de disciplines héritées du passé, la légitimité accordée au plaisir en même temps que l'émergence de nouvelles normes et de nouveaux pouvoirs, biologiques et politiques; la recherche du bien-être individuel et l'extrême violence de masse, le contact des peaux dans la vie intime et la saturation de l'espace public par la froideur des simulacres sexuels: tels sont quelques uns des paradoxes et des contrastes au sein desquels s'est constitué le rapport du sujet contemporain à son corps. Un autre enjeu surgit alors: interroger le corps en ce siècle heureux et tragique n'est-il pas une manière de poser la question de l'humain ? À l'heure où prolifèrent les corps virtuels, où s'échangent le sang et les organes, où s'estompe la frontière entre le mécanique et l'organique, où l'on s'approche de la programmation de l'espèce et de la réplication de l'individu, il est plus que jamais nécessaire d'éprouver la limite de l'humain : " Mon corps est-il toujours mon corps ? " L'histoire du corps ne fait que commencer.

115,70 €
Parution : Octobre 2006
1537 pages
ISBN : 978-2-0209-0438-4
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