Un silence religieux. La gauche face au djihadisme

Alors que la religion redevient partout une force matérielle et politique, la gauche semble désarmée pour affronter ce retour de flamme. C'est que pour la plupart de ses représentants, la religion ne serait qu'un simple symptôme du malaise social, une illusion qui occulterait les conflits économiques. Incapable de prendre la religion au sérieux, comment la gauche comprendrait-elle la prolifération de la violence djihadiste ? Elle qui identifie les insurgés aux damnés de la Terre, comment pourrait-elle accepter que, parmi les milliers de jeunes Européens prêts à aller mourir loin de chez eux, beaucoup sont tout autre chose que des laissés-pour-compte ? Là où il y a de la religion, la gauche ne voit pas trace de politique. Dès qu'il est question de politique, elle évacue la religion. Bref, elle n'envisage plus la possibilité de cette puissance qui domina si longtemps l'Occident et que Michel Foucault nommait une" politique spirituelle". Voilà pourquoi, quand des tueurs invoquent Allah pour semer la terreur en plein Paris, le président socialiste de la République française martèle que ces attentats n'ont" rien à voir" avec l'islam. Revenant sur des épisodes fondateurs (le moment marxiste, l'engagement algérien, le tournant iranien) ou récents (la" grande espérance" des djihadistes français, la tentation" islamophile" d'une certaine extrême gauche), ce livre décrit une gauche incapable de considérer la religion comme une puissance autonome, et donc de regarder le djihadisme en face. Il analyse, de façon vivante et remarquablement documentée, le sens et les conséquences de ce "grand escamotage".