La Grande Chute
«Soudain le ciel était devenu bleu. Il n'était pas seulement bleu, mais bleuissait, et bleuissait. C'était un bleuissement si délicat qu'il vous berçait de la certitude que cette délicatesse ne cesserait jamais. Ce bleu-là faisait resplendir la forêt tout entière. Et en même temps le comédien, poursuivant sa route, voyait dans cette illumination des choses qui l'entouraient la lumière d'un dernier jour, "de mon dernier jour" [.]» C'est un coup de tonnerre qui réveilla le comédien, en cette journée qui se terminerait par la Grande Chute. Il s'était endormi chez une femme qu'il retrouverait le soir-même, là-bas, dans la mégalopole. Complices ou bien amants, le duo qu'ils forment est encore bien flou aux yeux du narrateur qui suit pas à pas la préparation de «son comédien». Le tournage doit débuter le lendemain, mais il faut déjà quitter la maison, traverser la forêt, puis rejoindre la capitale. Les rencontres les plus étranges se succèdent sans que l'on sache réellement quels personnages existent ou lesquels sont fantasmés.
Peter Handke nous saisit par sa plume unique et nous emporte dans une pérégrination poétique. La société, la politique ou encore la nature conversent à travers cette figure de comédien qui se dirige inexorablement vers la Grande Chute. Annoncé tout au long du récit, cet événement mystérieux et angoissant nous hypnotise jusqu'à la dernière ligne de ce très beau livre.