Comme la nuit se fait lorsque le jour s'en va
«De son côté, Bouya ne mangeait plus, ne dormait plus, il ne voulait que sa sœur. Ce minuscule bout de sa mère lui avait apporté un bonheur inattendu, une alternative paisible à l'amour maternel perdu. Il était sa bouée, elle était l'air de la bouée. Dans le désespoir où il se débattait, il croyait que les autres ne cherchaient pas vraiment sa sœur parce qu'ils ne souffraient pas de sa disparition ; que lui seul la cherchait puisque lui seul l'aimait. À cette pensée, il se mit à sangloter, comme si les digues qui retenaient son chagrin avaient lâché d'un coup ; car le chagrin est une rivière à traverser, dans laquelle on perd pied par endroits, et dont le courant nous emporte, parfois.»
Tout commence à Conakry, en Guinée, dans une cour des miracles de nos jours où une femme meurt en couches. Ses congénères, des misérables qui survivent ou trépassent entre deux mondes, se disputent le nouveau-né afin de l'offrir, devant les mosquées, à la charité ostentatoire des fidèles. Bientôt le petit Bouya partira avec ses amis à la recherche de sa sœur kidnappée.
L'errance des enfants-mendiants, comme des étoiles perdues dans le sable, fera s'entrecroiser jusqu'à Marseille d'autres quêtes, cent autres destinées affamées, cocasses et révélatrices de notre monde. Au cœur de l'histoire, Malick qui, pour un billet d'avion, vend sa virilité ; et Khady vendue à un vieil homme par son père, plutôt qu'un lopin de terre, et qui tombe amoureuse de Malick. Les commerces humains et inhumains ne s'arrêtent pas là. C'est la misère éperdue des migrants, que l'auteur a vécue de près. C'est aussi l'espoir d'un retour aux sources et à la force des origines.