Le Tour du jour en quatre-vingts mondes
Irrévérencieux et tendres, provocateurs et enthousiastes, les textes réunis dans ce volume traitent de tous ces riens essentiels qui font la couleur des jours et tracent le jardin secret de chacun. Rendant hommage à son homonyme Jules Verne qu'il tient en très haute estime depuis l'enfance, Cortázar déclare que ce livre est mijoté « comme un fond de cuisson ».
Au gré d'une lecture ou d'une promenade, l'auteur nous invite à partager son plaisir, à écouter un solo de jazz, regarder un nuage solitaire à la lumière du couchant; qui compose un paysage à la Magritte au-dessus des collines provençales, à confectionner avec lui une cage destinée à «l'évêque d'Évreux», sarment en forme de mandragore, à participer à une discussion littéraire, à infléchir le cours d'un rêve.
Prônant le goût de l'absurde, déclarant la guerre à « Dame sérieux » qu'il rend responsable des pires crimes contre la spontanéité, l'humour et le goût du jeu, dénonçant les méfaits du «quotidien codifié», le grand écrivain argentin nous entraîne dans une ronde folle où culture et hasard se donnent la main.
« Dans les quatre-vingts mondes de mon tour du jour il y a des ports, des hôtels et des lits pour les Cronopes», dit-il. Il y a surtout des citations et des références à tout ce et à tous ceux qu'il aime et qu'il nous propose de regarder et d'écouter comme si nous les rencontrions pour la première fois : Aragon et Armstrong, Georges Bataille et Adolf Wôlfli, Lester Young et Man Ray, Neruda, Poe, Dickens, mais aussi un chat qui porte le nom d'un philosophe allemand et finit, à sa façon, par entrer en religion, une mouche qui vole pattes en l'air, une poupée éventrée et des personnages de romans indignés face au comportement irresponsable de leur auteur-inventeur.
Parfois aussi, et non sans malice, l'auteur lève un coin de rideau pour nous montrer sa cuisine et nous parler de l'étrange manière dont naît un récit fantastique digne de ce nom. Né à l'époque où l'on pratiquait beaucoup, dans la banlieue de Buenos Aires, les vieux almanachs de province, Julio Cortázar ressuscite ce genre littéraire à sa manière.
Ce volume regroupe des textes publiés en espagnol dans un recueil du même nom et dans un deuxième ouvrage intitulé Ultimo Round.