62 maquettes à monter

Comme dans son précédent roman, Marelle, l'auteur invite ici le lecteur à participer au grand jeu de la création littéraire en faisant son propre montage des éléments du récit comme si chaque personnage, chaque destin était la pièce d'un immense Meccano humain : chacun pourra ainsi composer « le livre qu'il aura choisi de lire ».
Rien de moins abstrait, pourtant, que la trame de cette « maquette » dont les personnages rivalisent d'humour et d'ingéniosité. A Vienne, ils hantent les couloirs d'un hôtel aussi historique que délabré, à la poursuite d'un vampire - avatar de la comtesse Erszebet Bathory. A Londres, ils se jouent des très sophistiqués membres de la « Société des névrosés anonymes » en leur faisant croire que certain tableau inconnu du British Museum possède des qualités secrètes : le directeur lui-même finit par y perdre son flegme. Dans la banlieue parisienne, une municipalité bien-pensante découvre que la statue de Vercingétorix commandée à l'un de ces plaisantins ressemble, à force d'abstraction, à un phallus géant...
En contrepoint, le monde secret des rives et des alchimies humaines, la Ville, où se joue le véritable destin avant de s'exprimer dans ce qu'on appelle la réalité. Parmi ces énigmes qui s'imposent au lecteur à la façon des bombes à retardement, la présence interchangeable du « parèdre », personnage en qui s'incarne le double de l'un ou de l'autre des protagonistes.
Le titre de ce roman fait référence au chapitre 62 de Marelle où l'auteur dénonçait déjà les lois habituelles de la psychologie : « Chimie, électromagnétisme, courants secrets de la matière vivante... en marge des attitudes sociales, on pourrait soupçonner l'interaction d'une autre nature, une partie de billard que certains individus suscitent ou subissent... »
Ainsi, 62 - Maquette à monter est peut-être le premier livre de l'homme qui marchera sur la lune.