La Vie dans les plis
La séance de sac
Je crache sur ma vie. Je m'en désolidarise.
Qui ne fait mieux que sa vie ?
Cela commença quand j'étais enfant. Il y avait un grand adulte encombrant.
Comment me venger de lui ? Je le mis dans un sac. Là je pouvais le battre à mon aise. Il criait, mais je ne l'écoutais pas. Il n'était pas intéressant.
Cette habitude de mon enfance, je l'ai sagement gardée. Les possibilités d'intervention qu'on acquiert en devenant adulte, outre qu'elles ne vont pas loin, je m'en méfiais.
À qui est au lit, on n'offre pas une chaise.
Cette habitude, dis-je, je l'ai justement gardée, et jusqu'aujourd'hui gardée secrète. C'était plus sûr.
Son inconvénient - car il y en a un - c'est que grâce à elle, je supporte trop facilement des gens impossibles.
Je sais que je les attends au sac. Voilà qui donne une merveilleuse patience.
[...]