Une vie divine
«Ludi est une merveilleuse menteuse. C'est d'ailleurs la phrase que je me suis murmurée au bout de trois ou quatre rencontres : "merveilleuse menteuse". Mère en veilleuse, très bonne menteuse. Il suffit de la voir, là, bien blonde épanouie aux yeux noirs, cheveux courts, avec sa robe noire moulante, sur la terrasse de cet hôtel, en été. Elle est fraîche, bronzée, elle sait qu'elle se montre, elle laisse venir les regards vers elle, elle s'en enveloppe comme d'une soie. Oui, je sais, elle vous dira qu'elle a pris deux kilos et que c'est dramatique, mais non, justement, elle est parfaite comme ça, rebondie, ferme, ses seins, son ventre, ses cuisses évoquent aussitôt de grands lits ouverts. Ah, ce croisement de jambes, ses fesses lorsqu'elle va au bar, sa façon de sortir et de rentrer et de ressortir et de rerentrer son pied de son soulier gauche – la cheville, là, en éclair –, et puis de rester cinq secondes sur sa jambe droite, et de recommencer, rentrer-sortir, rentrer-sortir, comme pour dire j'ai trouvé chaussure à mon pied, et c'est moi, rien que moi, venez vous y frotter si vous croyez le contraire. Son corps se suffit à lui-même et elle n'a pas à s'en rendre compte. Il dit tout ce qu'il y a à dire, mais elle ne pourrait pas le parler.»