La table citron
«C'était son congé annuel. Ses deux jours de permission. Il s'était fait couper les cheveux comme d'hab, avait fait nettoyer son blazer comme d'hab. Il était un homme ordonné, avec des désirs et des plaisirs ordonnés. Même si ces plaisirs n'étaient plus aussi intenses qu'ils l'avaient été. Différents, disons. En vieillissant vous ne teniez plus aussi bien l'alcool… Alors vous buviez moins, appréciiez mieux la chose… Et même chose avec Babs – comme il se souvenait de cette première fois avec elle, il y avait déjà tant d'années…»
Chez les Chinois, le citron symbolise la vieillesse et la mort. La table citron étant celle autour de laquelle on vient en parler, tous pourraient donc s'y asseoir. Sinistre? Pas du tout. Dans les onze nouvelles ciselées qui composent ce livre, Julian Barnes joue sur différents registres, du plus cruel au plus tendre. Il y a du Tchekhov dans ces pages-là – la délicatesse, la retenue – et du Gogol – la dérision, le trait à l'emporte-pièce. Plus un humour inimitable.