La lutte pour la reconnaissance
Axel Honneth est aujourd'hui, au niveau international, le représentant de la troisième génération de l'École de Francfort. Il en a maintenu le cap de la critique, celle notamment de la philosophie sociale moderne qui, depuis Machiavel et Hobbes, présuppose un rapport d'hostilité entre les individus désireux de garantir les conditions de leur survie. Axel Honneth interprète, à partir du jeune Hegel, les conflits humains dans la perspective d'une demande de reconnaissance : il met ainsi en lumière la dimension morale inhérente à tout affrontement et reconstruit l'évolution sociale à partir des luttes réelles ou symboliques dans lesquelles l'individu ne cherche pas tant à supprimer son adversaire qu'à être reconnu par lui dans son individualité (que ce soit l'amour, le droit ou la solidarité). Par ailleurs, la psychologie sociale moderne (les travaux de G. H. Mead et de D. W. Winnicott en particulier) enracine cette approche dans les mécanismes de formation de la personnalité humaine. En distinguant, dans cet ouvrage qui est au fondement de tout son travail depuis lors, trois formes de mépris - l'atteinte physique, l'atteinte juridique et l'atteinte à la dignité de l'individu -, correspondant aux stades de développement du rapport de reconnaissance, Axel Honneth nous dote d'un précieux instrument critique - une véritable «grammaire morale des conflits sociaux», fondée sur une théorie intégrée de l'homme et de la société.