La Tache

La souillure humaine, c'est-à-dire le mal, est au centre de ce roman qui raconte l'Amérique moderne, celle des années 1940 à 1998, avec ses crises - notamment l'affaire Clinton-Lewinsky -, ses secousses et ses failles, son puritanisme triomphant, son féminisme exacerbé, et la revanche des minorités, longtemps et toujours opprimées.

Tout cela défile à travers l'histoire de Coleman Silk, professeur à l'Université d'Athena, honoré et respecté, puis déchu de ses fonctions pour manquement à un " politiquement correct " qui vaut bien l'étouffement communiste. Il a en effet traité de " spooks " (" invisibles ") deux de ses étudiants qui brillent par leur absentéisme. Mais " spooks " est aussi un terme péjoratif appliqué aux Noirs, et précisément les deux étudiants en question sont noirs... Pour ce dérapage sémantique involontaire, Silk, qui est pourtant lui-même juif et noir, se verra pourchassé, dénoncé, humilié... Philip Roth réussi encore une fois, à la façon de Balzac, en se confiant au réalisme le plus minutieux, un livre extraordinaire, implacable dénonciation d'une certaine " morale " qui camoufle en fait la méchanceté, la lâcheté, la frustration, l'aigreur... - le mal, donc.