La vie conjugale

L’histoire est simple, exemplaire et hilarante : María Magadalena Cascorro, prototype de la jeune Mexicaine de la classe moyenne, rencontre à l’université Nicolás Lobato, prototype masculin de la même classe et, bien entendu, ils se marient.
Lobato, qui a hérité de son père une quincaillerie, se lance dans les affaires. Grâce à son opportunisme et à sa cupidité, il réussit fort bien dans le Mexique des années 1950-1960.
Désormais riche et puissante, María Magdalena peut enfin réaliser ses rêves. Elle commence par se faire appeler « Jacqueline », prend ses distances avec sa famille et essaye de tisser des liens avec les gens de sa « nouvelle » classe. Puis notre parvenue s’inscrit dans l’académie littéraire et culturelle de son amie Márgara (qu’elle finance largement) et se met à fréquenter des écrivains et des artistes.
Jacqueline n’est cependant pas une femme heureuse : Nicolás, accaparé par ses affaires et ses maîtresses, ne s’intéresse point à son intense vie spirituelle… On devine la suite : Madame Lobato prend des amants et a le chic pour tomber sur les hommes les plus désastreux qui soient : un jeune politicien qui lui soutire de l’argent, un professeur d’histoire de l’art qui finit par la battre… Car Jacqueline a un fantasme, pour la satisfaction duquel elle est prête à tout : faire assassiner Nicolás pour devenir enfin une veuve riche et joyeuse…
Roman délicieusement ironique et cruel, La vie conjugale met en scène les préjugés, les ambitions et, surtout, la bêtise d’une certaine bourgeoisie mexicaine qui prend ses désirs pour des réalités et finit par en payer le prix fort. De ce spectacle à la fois réjouissant et consternant, Sergio Pitol tire une morale un peu amère : vivre, c’est vieillir, et vieillir, c’est accepter d’affronter ce que l’on devient, ce qu’on a fait et ce qu’on n’a pas fait.