Romans
« Hammett a délogé le meurtre des palais vénitiens pour le "balancer" dans la rue ; non pas que le crime doive y traîner indéfiniment mais il était bienvenu de se défaire le plus possible des chichis bourgeois d'Emily Post. Au cours de presque toute sa carrière, il écrivit pour un public qui entretenait une attitude tranchée, agressive, envers la vie. Ce public ne redoutait pas l'immoralité du monde, celle-ci faisait partie de son quotidien. La violence ne le choquait pas, il la retrouvait en bas de chez lui. Hammett remit le crime entre les mains d'assassins dissimulant de solides mobiles et utilisant les moyens à leur disposition ; adieu cadavre exécuté arbitrairement à coups de pistolets de duel sculptés, de curare ou de poison tropical. Dans ses livres, il décrivit les gens tels qu'ils étaient et il les fit penser et parler, dans ses intrigues, avec le langage qui leur était familier. Il avait son style personnel, bien que son public ne s'en aperçût pas puisqu'il utilisait une langue soi-disant dépourvue de titres de noblesse. »
Raymond Chandler, « Le crime est un art simple », 1944.