Un ange à ma table, II : Un été à Willowglen
« À la vue du sol de terre battue et de cette espèce de "nulle part" qu’était l’intérieur de la maison, je fus envahie par un sentiment de découragement et d’isolement, et je sus que la maison de Willowglen ne serait jamais ma maison ; c’était trop petit, nous étions trop les uns sur les autres ; quand on était dans la chambre de devant, on entendait la radio de la cuisine aussi bien que si le poste s’était trouvé dans la pièce même. On entendait les disputes aussi, les voix qui montaient, et maman qui, comme chaque fois, disait tout bas d’un ton conciliant : "Allons, ne criez pas". Mes sœurs, mon frère et moi avions maintenant atteint l’âge d’avoir chacun "une vie privée" dont les autres n’avaient pas à être tenus au courant. Malgré tout, il nous arrivait encore de parler gaiement de nos rêves et de voir, avec force rires, "le côté marrant" de chaque événement. »
Janet Frame raconte ici son adolescence à travers un parcours que l’on peut qualifier d’initiatique et parle, entre autres, de son internement en hôpital psychiatrique.