Quelle n'est pas ma joie
Ellinor a soixante-dix ans. Elle vient de perdre Georg, son mari, et elle a rapidement décidé de vendre leur maison dans la banlieue chic de Copenhague, au grand dam de ses beaux-fils Stefan et Morten, et de retourner vivre à Vesterbro, dans le quartier populaire de son enfance. Et Ellinor va se raconter. Elle s'adresse alors à Anna, sa meilleure amie, morte il y a une quarantaine d'années. Anna qui était la première femme de Georg. Et la maîtresse de Henning, son mari à elle. Anna et Henning ont été emportés par une avalanche dans les Dolomites, pendant des vacances que les deux couples passaient ensemble, au cours des années 1970.Georg et Ellinor finiront par se marier, en gens tranquilles. « J'ai pris la place que tu as laissée. J'ai repris ta vie, Anna, comme en son temps j'avais repris ta robe de mariée. » Ellinor apprivoisera les garçons, s'occupera d'eux, de la maison, de Georg. Jusqu'à la mort de celui-ci.Au fil de son adresse à Anna, Ellinor raconte d'où elle vient. D'un quartier pauvre, où sa mère vivait seule. Seule parce que sa mère Sigrid était une « poule à boches » et parce qu'Ellinor était la fille d'un amour pendant la Guerre, entre sa mère et un officier allemand - qui n'est jamais revenu. Ellinor avait eu honte de sa mère médiocre, elle avait eu encore plus honte lorsque sa mère lui avait raconté la vérité.Le livre se termine sur la vision d'une photo de Georg et Anna en train de danser. Pour Ellinor, eux ont réussi à donner une image d'amour à leurs enfants. C'est cela qui compte. Elle, Ellinor, n'a pas pu le faire.Ce livre est une apostrophe, à la fois exercice de deuil, de mémoire et de réflexion. Un livre écrit à la deuxième personne du singulier, avec un « tu » qui donne une immédiateté nouvelle à la palette narrative de Jens Christian Grøndahl pourtant déjà si riche.