Après Constantinople
« Le soir venu, le peintre était toujours absorbé par son art retrouvé lorsqu'il sentit une présence silencieuse à l'entrée de la chambre. Dans la lumière déclinante, il distinguait mal la silhouette qui se tenait sur le seuil de l'étroit vestibule. Il perçut pourtant de lourds vêtements, le reflet de broderies de fils d'or et comprit aussitôt qu'il n'avait pas affaire à une servante. Se débarrassant maladroitement de son matériel de dessin, se relevant prestement, il fit face à celle qui s'avança et le salua avec une formalité dépourvue de toute complaisance.
La haute et solide stature, la richesse des habits, le maintien gracieux, ici, en ces terres si reculées, auraient suffi à l'ébranler, mais la peau noire de la femme acheva de le plonger dans un trouble qu'il eût toutes les difficultés à dissimuler.
Une fois, auparavant, une seule fois, il avait vu une femme noire qui n'était ni servante ni esclave. »