Picasso sorcier
Toute sa vie durant, Pablo Picasso (1881-1973) a constitué de manière obsessionnelle un véritable fonds d'archives sans précédent : à sa mort, 200 000 pièces d'archives personnelles sont retrouvées (environ 20 000 manuscrits de correspondance, 11 000 extraits de son argus de presse et 15 000 photographies) auxquelles s'ajoutent de nombreux objets du quotidien rappelant des événements insolites, qui sont autant de témoignages inestimables sur sa vie intime. Derrière ce qui pourrait être perçue comme une folle sédimentation - proche du syndrome de Diogène -, Pablo Picasso, le créateur, l'enchanteur, est en réalité mu par une volonté conservatrice, qui dissimule une crainte magique, celle d'être envoûté. Le statut singulier de ces objets est lié au souvenir, à la mémoire que l'artiste y attache, au sens symbolique et imperceptible dont ils recèlent, et qui ne peut être compris sans le concours de leur propriétaire. À ces objets où vie intime et souvenirs émotionnels s'entremêlent, s'ajoutent de véritables objets-fétiches - provenant de sa collection d'arts premiers comme de sa collection d'objets personnels. Tous, selon Picasso, renferment un esprit... Superstitieux par ses origines espagnoles et italiennes, l'artiste estime que les choses possèdent un être intérieur, une âme secrète dont le but est de protéger par des moyens non pas physiques, mais magiques. À travers une galerie illustrée de ces memorabilia - des souvenirs pour lui-même, devenus des souvenirs pour les autres -, ce livre propose d'appréhender l'« Être » Picasso, en explorant une facette méconnue de l'artiste - à la fois sorcier et superstitieux -, lui qui puisait au coeur de son intimité pour exercer sa toute-puissance créatrice.