Sortir la Gauche du coma
La spectaculaire élimination de la gauche au tour décisif de l'élection présidentielle clôt un cycle historique. Celui de sa présence au pouvoir -16 ans sur 21- pendant l'essentiel de la dernière période. C'est la gauche mitterrandienne qui a péri en ce printemps 2002. On avait pu espérer que Lionel Jospin, fort de l'expérience accumulée, ressource la gauche française. En dépit de ses qualités gestionnaires, il s'est révélé incapable de la renouveler. Les socialistes se sont de plus en plus coupés du pays réel, de ses préoccupations comme de ses aspirations.
C'est toute la gauche construite depuis le congrès d'Epinay de 1971 qui est remise en cause par l'imprévue sanction des urnes. L'inévitable débat qui s'ouvre en son sein, sur les causes de la défaite et les voies d'une refondation, s'annonce douloureux. Au-delà de ses erreurs conjoncturelles, la gauche française paie au prix fort toute une série de tares qui remontent loin dans son histoire : son mépris du réel, son amour de l'abstraction, sa méfiance à l'égard de la société, ses pratiques politiciennes. L'examen de conscience est rendu encore plus difficile par la crise qui secoue l'ensemble de la social-démocratie européenne. La gauche italienne a implosé, l'Europe rose n'est plus qu'un souvenir et la voie tracée par Tony Blair pose de redoutables problèmes d'identité à une gauche française contrainte de redéfinir sa doctrine.