Noces et autres histoires russes
"Strawinsky me lisait le texte russe vers après vers, prenant soin de compter chaque fois les syllabes de chaque vers, dont je notais le nombre en marge de ma feuille, puis on en faisait la traduction, c'est-à-dire que Strawinsky me traduisait le texte mot à mot". Souvenirs sur Igor Strawinsky, Ramuz.
De son écriture vigoureuse, Ramuz nous invite à le suivre dans un monde de fables burlesques et de rituels anciens. Sous leur apparente naïveté, ces poésies témoignent d'un moment essentiel de l'histoire du vingtième siècle où la modernité artistique se nourrissait aux sources primitives : chansons paysannes menacées d'oubli, masques africains ou dessins d'enfants. Strawinsky a puisé dans les poésies populaires russes la matière d'oeuvres fortes et radicalement nouvelles, qui sous leurs atours folkloriques ont une portée universelle".
Extrait de la préface de Georges StarobinskiEntre 1916 et 1919, Ramuz établit les versions françaises de huit oeuvres d'Igor Strawinsky en étroite collaboration avec ce dernier. Le compositeur s'était inspiré de poésies populaires russes ; Ramuz les transpose dans le terroir suisse romand. Ses transpositions, destinées au chant, sont éditées dans les partitions de musique, sous le texte original russe. Les traductions de Ramuz n'ont été rassemblées qu'en 1943, à l'instigation de Richard Heyd, qui venait d'assurer à Neuchâtel la direction des jeunes éditions Ides et Calendes. Tout juste un quart de siècle après la création de l'Histoire du soldat, un beau livre en est résulté, dont le charme doit beaucoup à ses hors-textes. En effet, si les textes se trouvent séparés de la musique qui en a dicté la forme, ils sont en revanche richement illustrés par des aquarelles de Théodore Strawinsky, le fils du compositeur.
Tous les documents qui ont servi à l'établissement de ce beau livre intitulé Noces et autres histoires russes ont été conservés - préface et poèmes autographes de l'écrivain, études préparatoires et dessins aquarellés du peintre. Ils ont été reliés par la suite avec une partition d'Igor Strawinsky. Tandis que les manuscrits de Ramuz apparaissent dans l'ordre où ils ont été publiés en 1943, les dessins de Théodore Strawinsky ont été rassemblés à la fin du recueil. C'est cet objet unique que l'on va pouvoir découvrir pour la première fois.