Saint-Gengoul
Octobre 1943. En pleine nuit, un train lancé vers Paris déraille. Parmi les morts, un homme d'une cinquantaine d'années tient serré entre ses mains un cahier qui porte en titre : A MA FEMME. Deux mois auparavant, Achille, le narrateur, a entrepris la rédaction d'un journal intime qui n'est qu'un long cri, déchirant d'amour et de haine, destiné à sa femme, Armande. Dans sa vingtième année, il a rencontré Armande au bord du lac d'Aiguebelette, en Savoie, où, orphelin, il a été élevé par son oncle. Séduit par la jeune fille, accueilli dans sa famille, il passe cet été-là des vacances enchanteresses. Seule ombre au tableau : Maurice, ami d'enfance d'Armande, beau, séduisant, intelligent, dont Achille est instantanément jaloux.
L'année suivante, Achille épouse la jeune fille et ils s'installent à Paris. Très vite, il est déçu par la froideur de sa compagne, et, à la faveur d'une confidence saisie au vol, il se persuade qu'elle est amoureuse -et l'a toujours été -d'un autre homme qui, bien sûr, ne peut être que Maurice. Dés ce moment, et malgré la naissance d'un fils, le couple n'est plus qu'apparences. Pendant vingt ans, l'amour désespéré d'Achille s'est fondu dans la haine et il part pour Chambéry, retrouver les souvenirs de sa jeunesse avant d'accomplir un dernier geste : se suicider en laissant à sa femme, grâce à son journal, un remords éternel.
Mais, au court d'une promenade, il rencontre Maurice, lui confie sa jalousie et son journal. Maurice remet les choses en place : il n'est pas plus amoureux d'Armande qu'elle ne l'est de lui. Seul, dans leur union, Achille est coupable d'avoir vécu sur un malentendu. Il n'a rien fait pour conquérir son épouse et s'est complu dans l'obsession d'une indifférence qui ne demandait qu'à être forcée. Ivre de joie, Achille reprend le train pour Paris, à la reconquête de sa femme. Et c'est l'accident... Saint-Gengoul est le patron des époux malheureux.