Au massacre mondain
Ce roman porte en exergue cette citation : Un homme penche toujours du côté où il va tomber. Il est précédé d'une préface, rédigée sous forme de lettre et particulièrement élogieuse, de Georges Simenon. Cette histoire se déroule à la fin de la Seconde Guerre mondiale, dans une grande ville de province traversée par un grand fleuve et à l'atmosphère pesante. Au massacre mondain est l'enseigne d'une salle de spectacle qui relève davantage du beuglant pour militaires que du music-hall. C'est là qu'aboutit un jour CARMONA, chanteur de talent, sans ressources, dont la carrière a été interrompue par la guerre et la Résistance.
Résigné, pour subsister, à pousser la chansonnette dans un spectacle d'une vulgarité affligeante, il a cependant la révélation d'un public aux joies simples. Au cours d'une promenade, il vient en aide à un vieil homme en proie à une douloureuse crise de rhumatismes, et le reconduit chez lui. Il s'agit d'un vieux libraire, Grillot, amateur d'art et collectionneur averti, pourvu de revenus confortables. Célibataire endurci, il n'a pour seule famille qu'un neveu qui meurt à 48 ans, laissant dans le dénuement une veuve, Félicie, et une fille, Nathalie. Le libraire, n'écoutant que son bon coeur, les recueille sous son toit. Le trio mène une vie agréable et tranquille jusqu'au jour où le hasard les remet en présence de Carmona.C'est le coup de foudre entre ce dernier et Félicie ; ils deviennent amants, à l'insu de Grillot.
Carmona réussit à convaincre le directeur du Massacre Mondain de rénover complètement son établissement afin d'y monter des spectacles plus éclectiques. Cependant, l'argent manque et Félicie, froide et calculatrice, décide de faire appel à son oncle. Mais Grillot apprend la liaison du couple, le prend très mal et Félicie ne trouve d'autre solution que d'empoisonner le vieil homme afin d'en hériter. Le libraire mort, la vie reprend son cours, mais, à la suite d'une dénonciation, la justice décide une autopsie du corps du défunt. Félicie, affolée, avoue son crime à Carmona. Pour la sauver, il s'enfuit en Belgique afin d'attirer les soupçons sur lui. La scène dramatique finale, d'une atmosphère très siménonienne, préfigure les grands moments de l'oeuvre à venir de Frédéric Dard.