Le Grand Turc et la République de Venise
Les gouvernements de l'Union européenne ont ouvert avec la Turquie des négociations ayant pour but son adhésion. Faute de débat public sur le principe de cette adhésion, la démocratie a été bafouée. De plus un risque majeur a été pris : faire aux Turcs des promesses que les populations n'ont guère envie de tenir. Les Français, en majorité défavorables à cette perspective, s'interrogent. Où seront en définitive les frontières de l'UE ? Quelle Union européenne bâtissons-nous ? Une entité forte, intégrée, capable de se faire respecter dans le monde ? Ou l'Europe minimaliste chère aux Britanniques ? Restera-t-il demain dans l'Union des politiques communes, porteuses de solidarité, ou auront-elles été bradées en raison de l'entrée d'un pays immense, très peuplé et - pour longtemps encore - fort pauvre ? Tout se passe comme si les gouvernants et la Commission n'avaient pas compris le message des deux référendums négatifs du printemps 2005 en France et aux Pays-Bas. Leur attitude défie le bon sens. Surtout lorsque les Turcs refusent de reconnaître l'un des vingt-cinq Etats de la famille européenne, Chypre, et bâillonnent ceux qui osent dire la vérité sur le génocide arménien. C'est à la France de susciter une prise de conscience pendant les négociations d'adhésion. Pour respecter la démocratie et rester fidèle à l'esprit européen, il n'est jamais trop tard.