Bloody Mary
Il y a la Ville-achélème avec ses alvéoles. Chacun sa petite case, les gens comme des guêpes. Escalier C. Appartement 412. Un drôle de bonheur. Il y a Locomotive-Baba N’Doula, laveur de carreaux, malien esporté-boeing, qui monte et descend le long de la plus haute façade de la tour. Et son vieil ennemi, un merle des Indes à qui son maître a appris des quolibets racistes. Il y a Théo-le-surinformé qui passe sa vie dans l’actualité : cinq transistors, distributeurs de kidnappings, viols et détournements, branchés en permanence. Il y a Émile, l’égoutier, qui s’est fabriqué dans le grand collecteur une pisciculture « toute en eau de Seine », où vivent des carpes de plus de sept étés. Des monstres qu’Émile repêche au milieu des hydrocarbures, en bouffant des pilules à bronzer.
Quoi encore ? Il faudrait aussi comprendre ce qui accule Jean-Y, le loubard de nord-banlieue à faire péter la Société à coups de grenades. Et ce qui fait perdre son sang-froid à Sam Schneider, affreux flicard, poulet exemplaire, redresseur de l’Ordre. Bloody Mary, sa femme, peut-être. Une foldingue atteinte de bovarysme aigu, qui se prend toujours pour quelqu’un d’autre. Une pousse-au-crime, celle-là...