Histoire des origines du christianisme, tome 2
Renan fut tout sauf un tiède. Dans l'Histoire des origines du christianisme sa pensée s'aiguise autour des conditions d'émergence d'une spiritualité authentique : quelle religion pour quel avenir ? La doctrine de Jésus, dont l'historien suit la formation ou l'"embryogenèse", lui apparaît comme porteuse d'avenir par sa vitalité, c'est-à-dire par sa capacité de métamorphoses. Selon lui en effet, en histoire religieuse, "les textes valent surtout par ce que les besoins du temps leur font dire" ; c'est donc à travers les interrogations du présent et les linéaments du futur qu'il questionne les Evangiles. A la différence de Lamennais qui "changea sans se transformer", Renan se transforma sans changer : sa libre pensée reste une pensée religieuse, une sorte de libre pensée religieuse ; elle tenta de faire du christianisme ce qu'il nomme la "religion absolue", c'est-à-dire au sens propre, détachée - détachée d'abord de toute forme religieuse. De nos jours encore la multiplication des Vies de Jésus atteste la fécondité des intuitions de Renan : "La Vie de Jésus obtiendra toujours un grand succès, écrivait-il en 1877, quand un écrivain aura le degré d'habileté, de hardiesse et de naïveté nécessaire pour faire une traduction de l'Evangile lui-même, son incomparable beauté intrinsèque." Ce que suit l'historien des Origines, jusqu'en l'an 180 après Jésus-Christ, c'est le christianisme à l'état naissant, attestant la religion non comme contrainte mais comme liberté.