Onze histoires de solitude
Écrites entre 1951 et 1961, les onze nouvelles du recueil traitent de ce mal intemporel qu'est la solitude. La grande majorité des personnages de Richard Yates est composée d'outsiders, d'incompris qui sont rejetés par la communauté qu'ils tentent désespérément d'intégrer.
Que ce soit dans l'armée (« Quand Jimmy reverra sa brune »), à l'école (« Le docteur jeu de quilles »), dans la rédaction d'un journal (« Contre les requins ») ou dans un hôpital (« Fini l'an 'ieux, 'ive l'an neuf! »), ils luttent pour trouver leur place dans la société. Comme le disait l'auteur, ceux qui réussissent ne l'intéressent pas. Jamais méchant mais sans concession, il préfère pointer les failles d'hommes et de femmes ordinaires souvent victimes des circonstances.
Dans ces nouvelles finement aiguisées et dont les mots sont délicatement choisis, il met aussi en lumière une époque particulière de l'Amérique. Celle où le rêve américain se réalisait enfin et, en même temps, où il commençait pour certains à sonner faux. C'est l'après-guerre, la naissance des banlieues, le conformisme. Les soldats reviennent traumatisés mais sont censés agir comme si tout allait bien. Les jeunes s'accrochent difficilement aux plus basses marches de l'échelle sociale. Ils sont coincés dans des mariages insatisfaisants où la femme, si elle n'est pas secrétaire pour aider aux fins de mois difficiles, attend sagement son mari à la maison (« Sans peur et sans reproche » et « Tout le bonheur du monde »). Enfin, c'est le temps des martinis, des pianos-jazz où il règne comme un arrière-goût de l'époque fitzgeraldienne (« Un pianiste de jazz formidable »).