Grandir
Quand l'auteur parle de grandir, elle parle d'elle-même. Sa mère est très âgée et dépendante d'elle, entièrement. Il arrive que cette mère soit absente et parfois, au contraire, ses paroles et sa présence sont justes, drôles et imprévisibles. Et durant toute cette période ultime, l'amour qu'elle a donné à sa fille lui est rendu comme on voudrait qu'il le soit toujours. Chaque morceau de la vie d'une vieille dame si vulnérable est raconté : un jeune médecin, l'appétit, les vacances, un aide-soignant, les petits-enfants, des mains très douces, des souvenirs, l'Arménie, une amie d'enfance. À la page qui suit, on voit sa fille : une cavale, une vie à gagner, un défilé de mode, des articles à écrire, des dîners décommandés, la ville à traverser quand sa mère est tombée, tout de suite les infirmières de jour et celles de nuit, les douceurs. Avec des phrases très simples comme : « Elle a fait de mon enfance une vraie enfance, je peux bien lui rendre à présent », et qui vous serrent le co eur. Ou bien des dialogues : « Ouh là, ne prie pas pour moi, hein ? » J'ai demandé pourquoi. Elle a dit : « Ne va pas me faire repérer. »
Le miracle du livre : parce que sa mère est devenue son enfant, l'auteur grandit. Elle a eu cette grâce et elle pense : « D'où me vient tout cet amour ? »