Divorce à Buda
Défini par l’auteur lui-même comme « le roman d’une bourgeoisie hongroise, fondatrice de la Hongrie moderne », Divorce à Buda, publié en 1935, est issu de la même veine que Les Braises, L’Héritage d’Esther ou La conversation de Bolzano (tous trois parus entre 1939 et 1942) : même atmosphère nocturne et somnambulique, même confrontation centrale de deux personnages dont le face à face tardif fait émerger des tréfonds de leur passé commun, au terme d’un suspense psychologique d’une rare intensité, un secret vital – et la vérité des âmes.
Kristov Kömives, juge d’une quarantaine d’années, homme de principes, catholique, marié et père de deux enfants, compulse ses dossiers avant de quitter son bureau un soir d’automne : il est à la veille de prononcer le divorce d’un couple qui ne lui est pas inconnu. Le mari, Greiner, médecin, est un de ses anciens condisciples. Quant à la femme, Anna, il se souvient de l’avoir rencontrée trois ou quatre fois il y a une dizaine d’années, avant leurs mariages respectifs, rencontres relativement anodines mais dont il garde cependant un souvenir très vif.
La perspective de ce procès, la remémoration du passé et les réflexions sur sa propre vie que ce divorce lui inspire créent chez Kömives un inexplicable état de malaise qui s’aggrave encore dans la soirée, au cours d’un dîner chez des confrères, où il se surprend à tenir des propos inhabituels sur la responsabilité et la morale…
Rentrant chez lui avec sa femme, il découvre que, malgré l’heure tardive, un visiteur l’attend. C’est Greiner, qui lui confesse qu’il vient de tuer Anna.
Roman de la litote et du non-dit, Divorce à Buda évoque un monde en crise – ville en pleine mutation, menace de la « guerre moderne », bourgeoisie traditionaliste figée dans le refoulement. Mais le cas d’Imre Greiner illustre aussi de façon poignante l’impossibilité de l’amour total, entrevu, mais dans une autre réalité, inaccessible.