Adieu les langues de chat
Danseuse, chorégraphe d’origine allemande et ayant adopté le français comme langue d’écriture, Sabine Macher note sa vie dans le défilement des jours avec une syntaxe et une langue bien à elle qui disent la beauté du déracinement, de l’éphémère, la géométrie du quotidien et de l’intime. Ses livres sont composés de brefs fragments qui, par la grâce d’une écriture empreinte d’une apparente naïveté, donnent une dimension singulière à la banalité et révèlent, de façon convaincante, ce que peut être un être, et d’abord un corps, avec ses réactions, ses habitudes, ses surprises. Dans chaque livre de Sabine Macher, la critique l’a remarqué, une érotique se met en place, d’autant plus troublante que les scènes sexuelles n’y interviennent pratiquement pas. Adieu les langues de chat, son sixième livre, va plus loin dans cette voie tout en gardant une constante rigueur d’écriture et de pensée. Le point de départ est une commande d’un texte érotique destiné à une collection de poésie. Il y avait là un défi que l’artiste ne pouvait esquiver, tant il rejoignait ses interrogations essentielles : comment dire ce qui se passe de mots ? Ce qui se fait habituellement sans parole, ou avec des paroles qui relèvent d’une autre logique que celle qui soutient généralement la langue ? Quels mots pour décrire la réalité sexuelle d’une rencontre où la banalité n’exclut pas l’intensité et où la répétition n’interdit ni l’imprévu ni l’inconnu ? Pendant six mois, Sabine Macher a exploré ces questions dans des cahiers utilisés comme matériaux pour ce livre. Dans un second temps, elle en a effectué un montage qui en bouleverse la chronologie. Tout est donc vrai, mais décalé, redistribué dans une trame qui permet à la littérature de recouvrer ses droits.