Les portes du néant
Depuis son exil, Samar Yazbek est retournée clandestinement trois fois en Syrie en s'infiltrant par une brèche à la frontière turque. Au-delà du besoin de retrouver son peuple et son pays, Samar Yazbek ressent l'urgence de témoigner. Elle est le seul auteur syrien à se rendre dans la région d'Idib (au nord-ouest du pays) où elle est accueillie par une famille dont on suit le destin.
À chacune de ses visites, elle vit de l'intérieur l'horreur de la révolution, la montée du jihadisme, puis l'afflux croissant des jihadistes étrangers qui viennent littéralement voler aux Syriens leur révolution. Au mépris du danger, elle multiplie les rencontres : femmes, enfants, rebelles, civils en armes mais aussi jihadistes. Chacun a une histoire unique à raconter, leurs destins croisés forment peu à peu la toile de fond de ce récit.
Au coeur de cette folie, Samar Yazbek découvre aussi la réalité profonde de l'exil : ce n'est pas simplement être « dehors », c'est être nulle part. Et, chaque fois que vient l'heure du départ, Samar sent monter l'angoisse d'abandonner ses amis derrière elle. Ils l'encouragent pourtant à partir. « Ne meurs pas ici », lui dit une femme, « pars tant que tu le peux et demeure ce fil qui nous relie au monde ».