Ballets roses
" Pourquoi donc, quand on m'a proposé d'écrire sur un fait-divers, ai-je spontanément pensé à l'affaire des ballets roses ", scandale presque oublié des années 1959-1960 ? Trois raisons au moins :
D'abord parce que je suis impressionné, parfois choqué, par l'irrationalité avec laquelle les affaires de mœurs se déchaînent dans l'opinion, mêlant faits et fantasmes, excitation collective et réprobation (Outreau en a donné l'exemple spectaculaire). Ensuite parce que les Ballets roses ont pour toile de fond la fin de la IVe république et le retour du général de Gaulle dont l'un des acteurs fut mon arrière-grand-père, René Coty. Après Les pieds dans l'eau, ce mélange d'histoire familiale et d'histoire tout court ne manquait pas d'attraits pour le romancier. Enfin j'ai trouvé l'occasion d'évoquer ces années cinquante, à la fois proches et lointaines : une France presque disparue avec ses modes et ses chapeaux, ses voyous et ses honnêtes gens qui pourraient former le décor d'un film en noir et blanc.
Le sujet principal reste évidemment l'affaire : comment un groupe de jeunes filles mineures, recrutées par un pseudo-policier, allait servir aux plaisirs d'une bande de commerçants, d'hommes d'affaires, et surtout du président de l'Assemblée Nationale André Le Troquer. La personnalité de ce dernier m'a particulièrement intéressé : parce que son histoire comporte des épisodes plus glorieux, notamment dans la Résistance ; parce qu'il eut toute sa vie l'amour des starlettes, avant qu'un péché de vieillesse ne l'entraîne dans cette chute calamiteuse. Ce feuilleton policier suit plusieurs lignes : historique, politique, psychologique, personnelle. Il reste près des faits, sans extrapoler, mais en tâchant de retrouver la vérité d'un moment perdu. "