La fin du film
Un hôtel, perdu au milieu du désert, quelque part en Californie, au début des années soixante. Une équipe de cinéma y séjourne, pour y tourner un film, qui rappelle étrangement les mythiques Misfits de Huston, et son cortège de malédictions... Le tournage a dû être interrompu : la star, Kitty, dépressive, droguée aux médicaments, est incapable de sortir de son lit. Dehors, un feu de forêt fait rage et menace le frêle hôtel. A l'intérieur, c'est la rage et le désespoir d'une femme trop belle, trop célèbre et trop fragile, qui se joue - et l'avenir d'un film. Tous se pressent au chevet de Kitty : le producteur, entrepreneur en bulldozers reconverti dans le septième art ; Edna, secrétaire personnelle de Kitty et maîtresse du producteur ; Clemson, metteur en scène ivre mort et flambé au jeu ; Paul (alias « Miller »), scénariste, mari de la blonde, Pygmalion impuissant ; et enfin les Fassinger, fantômes grotesques de Lee et Paula Strasberg, gourous qui phagocytent la starlette. Le personnage le plus mémorable, bouleversant, c'est encore elle - cette femme au seuil de l'effondrement, fantomatique, dont on ne verra d'ailleurs jamais que le dos nu, dont on n'entendra que les gémissements... La dernière pièce d'Arthur Miller raconte, à peine déguisée, l'histoire du dernier film achevé de Marylin, la ronde des croque-morts autour d'une déesse au crépuscule, la comédie pathétique des hommes, l'agonie d'une femme en coulisses. Une pièce cruelle et sublime, rideau déchirant sur une cohorte de mythes où se mêlent la vie, le cinéma, le théâtre, l'amour.