Un homme de passage
Il s’agit d’un roman torrentueux, baroque, puissant, où Serge Doubrovsky fait, de sa propre vie, la matière qu’il sculpte. Une vie : celle d’un « homme de passage », juif, français, américain, amateur d’étudiantes, joyeux, désespéré, athée, pieux et solidement installé entre plusieurs identités. Dans ce roman – très « Philip Rothien » - Serge Doubrovsky raconte tout. Et il le fait dans une langue qui hésite à dessein entre le désordre et le classicisme. C’est parfois hilarant, parfois tragique avec, en note de fond, en basse continue, la dérision – qui, selon Doubrovsky, est la caractéristique de toute existence. Précisons que l’auteur ne raconte pas sa vie de façon linéaire. Il choisit d’en regrouper des « paquets d’épisodes » (souvent éloignés dans le temps) sous des thèmes, voire de simples mots : « départs », « femmes », « portes », « retours », etc. Cette audacieuse mise en perspective a pour effet de rendre le lecteur « contemporain » de l’avant et de l’après – en même temps. De ce grand roman, on ressort secoué et ébloui.