Ilitch, mort ou vif: roman
Charlie Boy est atteint d’une maladie mortelle. Son meilleur ami, le narrateur du roman, l’aide à passer ce cap, non en lui prodiguant des consolations mensongères, mais en lui racontant une histoire. Et quelle histoire ! Celle de Vladimir Ilitch Oulianov revisitée à sa façon. Charlie Boy a été militant dans sa jeunesse, et Lénine est resté pour lui une vieille connaissance. Seulement, ce n’est pas l’histoire vraie et lugubre du chef communiste que lui raconte son ami, mais l’histoire rêvée, améliorée, symbolique, mêlant les événements réels et la loufoquerie la plus révélatrice. Qui aurait cru que Lénine vivait encore dans une chambre sombre du Kremlin en 1968 ? Qu’une infirmière lui apportait des sachets de marrons ? Que Lénine se faisait expliquer l’histoire de l’URSS depuis sa « mort » ? Que, apprenant mortifié le pouvoir absolu de Staline, les procès de Moscou et l’exécution de ses amis les plus proches, il décide d’aller rendre visite à sa propre momie ?
Dans cette variation fantastique d’un scénario à la "Good Bye Lenin", portée par un style étincelant, l’univers de Charlie Boy et celui de Vladimir Ilitch se font écho, dans un roman profondément original qui associe virtuosité historiographique et émotion. Si le double ressuscité au Kremlin permet à l’auteur d’entrer dans l’intimité d’un personnage défiguré par les mythes, Ilitch, mort ou vif est avant tout un roman d’amitié. Dédié par Roger Magini à Charles Gagnon, un ami qui avait dirigé le Parti communiste québécois (il est mort en 2005), sa leçon est, au-delà de la fantaisie et du brio, celle du pouvoir d’évocation de la littérature. Ou bien : « Qu’imaginer, c’est apprendre à mourir. »