L'amour après
« J'ai perdu la vue à Jérusalem. Ça n'a rien à voir avec Dieu, je n'y crois pas. Mais c'est arrivé là-bas, comme ça, d'un coup. Et je n'ai pu m'empêcher d'y chercher un sens ». Condamnée « au noir jusqu'à la fin de ses jours », Marceline Loridan-Ivens regarde en elle, se souvient et se livre. Avec son amie et complice d'écriture Judith Perrignon, elle ouvre sa « valise d'amour » - où, depuis 1946, à son retour des camps, Marceline range, cache, oublie des mots passionnés, des petits papiers tendres, des pensées pour un homme, des lettres douloureuses, des dessins... Une vie d'amour et de sentiments, tandis que le passé ne se laisse jamais enfouir. Peut-on aimer, désirer et jouir après les camps ? Ou reste-t-on à jamais la « fille de Birkenau » ?
Au fil des pages, merveilleusement libres, sensuelles et âpres, on plonge dans le Paris d'après-guerre, où les femmes se cherchent une liberté de corps et d'esprit. On découvre un mari, Francis, aimé puis delaissé aux anciennes colonies ; des amants joyeux, en colère, pleins d'espoir, tel Georges Pérec, dont le portrait trône chez Marceline ; des hommes de passage ; le plus cher et le plus tendre des amis, Jean-Pierre ; et bien sûr le grand documentariste Joris Ivens, qui partagea trente ans de sa vie, rue des Saints-Pères.