Quelques motifs de la psychanalyse : A partir des travaux de Laurence Kahn
Laurence Kahn, psychanalyste, membre de l'Association psychanalytique de France, a d'abord été anthropologue de la Grèce ancienne, auprès de Jean-Pierre Vernant, avant de choisir la psychanalyse. Les neuf livres et la soixantaine d'articles qu'elle a publiés depuis quarante ans rendent compte de sa pratique psychanalytique et de l'état de la psychanalyse, qui lui paraît être aujourd'hui en « crise » : d'après elle, l'inflation de la notion de trauma, dès qu'apparaissent des difficultés psychiques, ou de celle d'empathie, qui suffirait à qualifier l'écoute thérapeutique, conduisent à laisser de côté certains concepts clés, comme la pulsion, la sexualité infantile ou la compulsion de répétition, et tendent à altérer la rigueur et l'efficacité de la méthode psychanalytique. Mais ses travaux sont aussi des travaux d'histoire de la pensée, qui bénéficient de sa formation initiale d'historienne et dont l'intérêt dépasse les frontières du milieu psychanalytique. Réfléchissant à l'idée proposée par Freud d'une alliance entre la culture et la barbarie, elle en est progressivement venue à voir dans le renoncement de certains courants psychanalytiques à la théorie freudienne une conséquence à long terme des efforts menés par les nazis pour édifier une « contre-culture ». C'est ce qu'elle analyse avec précision dans son dernier livre : Ce que le nazisme a fait à la psychanalyse, en s'appuyant sur les travaux récents des juristes et des historiens, ou sur ceux plus anciens de Klemperer. Lectrice avisée entre autres d'Adorno, et, dans les années récentes, du romancier Imre Kertész, elle associe régulièrement les oeuvres de la philosophie et de la littérature à sa réflexion sur le legs freudien, montrant combien celui-ci contribue à la compréhension du monde actuel.