Chirac, l'homme qui ne s'aimait pas
Cent fois, il a pensé s'arrêter, cent fois, il a continué. Cent fois, il a trouvé les autres meilleurs que lui ; cent fois, il les a abattus. Toute sa vie il a fait de la politique comme on va au boulot, chaque matin, sans se prendre pour le maître du monde. Pourtant, depuis qu'il est à l'Elysée, il songe parfois avec orgueil que son modeste métier est devenu destin. La politique a été pour lui un hasard et une nécessité, un mode de vie pour mettre à distance la vraie vie, un moyen commode de courir pour mieux se fuir, une manière festive de croquer l'existence avec ses grandes dents de loup faites pour manger tous les petits Chaperons rouges ; donner un peu de bonheur individuel aussi parfois. Il n'a jamais cru au grand soir, jamais cru que la politique changerait le monde. "On lui reproche d'avoir mélangé caisse publique et caisse privée. Mais a-t-il eu une vie privée ? Il veut être protégé, respecté, considéré. Il ignore superbement l'avertissement du général de Gaulle : "L'aventure individuelle est une passion enfantine." Il s'en moque."