Paroles de nos anciens
On imagine mal ce que pouvait être l'existence journalière des gens de naguère, bien avant que la machine ne vienne améliorer leur condition. Souvent on naissait sans être vraiment désiré ; on grandissait comme une mauvaise herbe et sitôt les dix ans, avec plus de force en bras que de jugeote en ciboulot, on se louait pour gagner sa croûte loin des jupes rassurantes d'une mère trop occupée à torcher les puînés. On apprenait le boulot sur le tas, en regardant faire les anciens qui n'étaient pas avares en coups de pied au cul.
Ils ne sont plus légion, ceux qui peuvent encore évoquer ces duretés qu'ils ont endurées. Les années ont coulé. Ils sont partis les uns après les autres, sans bruit, le plus simplement du monde. Avec eux ont disparu les derniers témoins d'une époque à jamais révolue.
Gérard BOUTET En quarante ans, de 1920 à 1960, la vie quotidienne dans nos campagnes a subi plus de transformations que pendant les vingt siècles qui ont précédé.
Conscient de la disparition progressive d'un savoir-faire rural devant les assauts de l'urbanisation et de la mécanisation, Gérard Boutet a arpenté nos campagnes à la rencontre de ces gens de peu, les gagne-misère, et a rapporté sans nostalgie le récit de leur vie quotidienne avant qu'ils ne s'éteignent, et avec eux la mémoire de nos campagnes.