Le gâchis des généraux
Charleroi, Douaumont, le Chemin des Dames : ces noms de batailles tristement célèbres évoquent aujourd'hui autant de massacres inutiles, engagés par un commandement qui avait pour seul objectif de "tenir", fût-ce au prix de la vie de dizaines de milliers d'hommes. Mais jamais un général, même notoirement incompétent, n'a été lourdement sanctionné. Il risquait au pire la disgrâce et le limogeage, parfois temporaires. Quatre-vingts ans plus tard, Pierre Miquel, auteur notamment des Poilus, rouvre ce dossier brûlant et, pour la première fois, un ouvrage y est exclusivement consacré. Offensive après offensive, boucherie après boucherie, il livre un tableau très sombre du commandement, mettant en évidence les erreurs grossières de tactique et leurs conséquence catastrophiques.
Bénéficiant d'une complète impunité, jouissant du privilège de ne comparaître que devant leurs pairs, les généraux de la Grande Guerre, compétents ou non, n'ont pour la plupart été qu'occasionnellement économes de la vie de leurs hommes, et une opération réussie justifiait toutes les pertes : alors, en effet, "faire marcher à la mort des millions d'hommes n'était pas un crime, mais un métier." À méditer. --Thomas Ferrier