Un vrai roman
Sollers", du latin "sollus" et "ars", ce qui veut dire "tout entier art". Philippe Sollers avait quinze ans quand il s'inventa ce pseudonyme en forme de serment. Il publie avec jubilation ses Mémoires, qu'il appelle Un vrai roman.
« Ecrire et vivre, c'est la même chose ». On n'avance pas cette vision du monde par hasard. On ne sait rien, ou presque, de Philippe Sollers, sauf si l'on se décide à le lire vraiment : les documents ne sont pas rares, ils sont là, ce sont ses nombreux livres. Une existence d'écrivain est par définition une bombe à retardement : son enfance, ses rencontres (et Dieu sait s'il y en eut d'importantes), ses amours, ses amitiés, ses inimitiés, ses deuils, ses ruses, ses dissimulations, ses bonnes actions cachées, ses clandestinités, ses difficultés, ses réussites, bref sa tactique et sa stratégie sont partie intégrante de ses livres.
La société du spectacle dans laquelle nous vivons, la plupart du temps, s'acharne à affubler l'écrivain d'une identité qu'il n'a pas. "Le moi social est une construction des autres" disait Proust et, contrairement à l'idée reçue, écrire et vivre sont du même tissu.
1958 : parution de son premier livre : Une curieuse solitude. 2007 : publication de Un vrai roman - mémoires. Voilà donc bien longtemps que Philippe Sollers occupe une place prépondérante dans le paysage littéraire et intellectuel français. Parti du récit avec intrigue traditionnelle, il est passé par l'avant-garde du groupe théorique « Tel Quel », dont il fut le principal animateur, pour se retrouver « best-seller » avec Femmes, Portrait du joueur, Le Coeur absolu, La Guerre du goût, Dictionnaire amoureux de Venise et, plus récemment, Une vie divine. Quant à son parcours, tout en sinuosités et redressements spectaculaires, il a toujours refusé toute repentance, s'en tenant à l'inexpugnable liberté de la littérature. Convaincu de la puissance subversive de l'inspiration, il appelle « l'Adversaire » le système qui nous gouverne en ne reconnaissant que la valeur marchande des choses et des individus et en méprisant le vrai trésor de l'humanité : la langue et la pensée.