Une Passion
Le Christ crucifié occupe une place particulière dans l’oeuvre de Diego Vélazquez.
Peint en 1632, il diffère de toutes les autres compositions du grand maître du siècle d’or espagnol, ce qui explique qu’il soit peu connu des amateurs. Voici en effet une vision sobre, dépouillée et émouvante d’un moment bien particulier de la Passion : la mort du crucifié. Spécialiste de l’époque napoléonienne, Thierry Lentz a fortuitement rencontré ce tableau au musée du Prado, dans les années 1990. Il était venu y voir les Goya sur la guerre d’Espagne de 1808-1813. Il découvrit non pas un autre peintre, mais un seul des tableaux d’un autre peintre. Cette rencontre produisit sur lui un effet si particulier qu’il en fut poursuivi pendant des années, jusqu’à ce qu’il se décide à en savoir plus sur le tableau. Le résultat de sa recherche est cette promenade personnelle mais aussi instructive dans et autour de ce rectangle de toile recouvert d’huile par la main d’un génie peut-être porté par « quelque chose » qui dépasse l’humain.
Au-delà de l’histoire du tableau, des circonstances mystérieuses de sa commande et de sa réalisation à ses tribulations de la fin du XVIIIe siècle, et de son statut si particulier dans l’oeuvre de Vélazquez, l’auteur tente de répondre à des questions générales (comment représente-t-on une crucifixion ? quels en sont les acteurs privilégiés, les références évangéliques et, partant, les buts philosophiques et politiques recherchés ?) et particulières (pourquoi Vélazquez a-t-il opté pour ce moment-là de la Passion et comment a-t-il tranché de grandes questions qui ne sont futiles qu’à première vue tels le nombre des clous, la présence du sang, la corpulence et le visage du Christ ?) Au fil de ce récit, Thierry Lentz tente de répondre aussi à son propre questionnement sur ses sentiments et ses réactions qui jaillissent chaque fois qu’il est mis en présence de ce tableau.
Peut-on et doit-on tenter de percer le mystère de ses émotions ?