Le secret du mal
Le secret du mal rassemble dix-neuf textes sur lesquels travaillait Roberto Bolaño au moment de sa mort. Ignacio Echevarria, grand connaisseur de l'oeuvre, ami et exécuteur testamentaire de Bolaño, les a réunis et ordonnés, en tâchant de donner aux lecteurs de ce recueil posthume l'idée la plus proche et la respectueuse de ce qu'aurait été son quatrième recueil de textes brefs, dans la lignée du Gaucho insupportable, mêlant récits, écrits plus ou moins autobiographiques et discours ou conférences.
Les textes dont le narrateur renvoie à l'auteur et à son alter ego, Belano : La colonia Lindavista évoque en même temps que les premières années de vie d'un jeune Chilien à Mexico, le mystère qui semble envelopper le couple de voisins. Le vieux de la montagne raconte les premiers temps de l'amitié entre Lima et Belano, leur participation à un groupe de jeunes poètes où l'on reconnaîtra les réal-viscéralistes des Détectives sauvages, et, en un résumé empreint de tristesse, la destinée des deux hommes, que l'insolence et l'irrespect ont définitivement mis au ban de la vie culturelle mexicaine.
Mort d'Ulises constitue une sorte de suite du récit précédent. Le narrateur, qui a certains traits de l'auteur, retourne à Mexico pour la première fois depuis des années et se rend sur les lieux où habitait avant sa mort Ulises Lima. Ces deux textes sont parmi les plus mélancoliques du recueil. Je ne sais pas lire raconte le retour dans son pays natal d'un écrivain qui ressemble à Bolaño, et dont le regard s'attarde sur son jeune fils Lautaro, sur une amie chilienne, plutôt que sur le pays.
Les journées du Chaos est une brève projection dans le futur, où le narrateur va à Berlin à la recherche de son fils Lautaro disparu, et c'est comme si recommençait une nouvelle odyssée, dont nous ne connaîtrons pas la fin.
Les récits et les essais parcourent le spectre de la littérature de Bolaño, énigmatiques, mélancoliques, drôles, inquiétants Le secret du mal nous laisse avec un journaliste réveillé en pleine nuit par le coup de téléphone d'un inconnu, qu'il va finalement aller rejoindre.
Le fils du colonel est un récit d'une grande drôlerie au cours duquel Bolaño s'amuse à raconter un film de zombis, présenté il est vrai par le narrateur comme sa biographie. Sages de Sodome est une variation en deux temps sur un séjour effectué par Naipaul en Argentine, qui s'achève sur des considérations moralisatrices sur le goût de la sodomie qu'auraient les Argentins.
La chambre d'à côté met en scène un jeune homme qui passe la nuit dans un hôtel d'Amérique centrale et entend une conversation dans la chambre voisine, au cours de laquelle on comprend que l'un des deux hommes a tué une femme.
Labyrinthe est une description d'une photographie du groupe littéraire Tel Quel vers 1977. Les personnages sont décrits et leurs pensées puis leurs vies sont exposées à partir de cette image. Nous percevons le processus qui se développe au cours de la description, accumulant des hypothèses sur les individus, digressant et inventant des scènes avec d'autres personnages qui n'apparaissent pas sur la photo.
Crimes raconte l'intérêt d'une journaliste pour un crime commis sur une jeune femme à laquelle elle s'identifie. Elle se retrouve seule dans la salle de rédaction, un homme inconnu arrive et ils se mettent tous deux à discuter de ce crime. Dans Plage, un ancien drogué sous méthadone se rend au bord de la mer tous les jours et observe un vieux couple, elle lisant à l'ombre et lui, une sorte de squelette, étendu au soleil. C'est l'un des plus beaux textes du recueil.
Muscles s'attache à la vie de deux jeunes gens, une soeur et un frère, dont les parents sont morts et qui voient leur vie peu à peu se modifier avec l'arrivée de deux Latino-américains, l'un d'eux devenant l'amant du frère. La tournée raconte l'histoire de la disparition d'une star du rock, Malone, qui s'évanouit dans la nature au moment même de l'arrivée de la gloire, après son retour de tournée. Le groupe, Broken Zoo, continue sa carrière, plus brillante encore qu'au début. Le texte s'achève sur la découverte que l'ancienne vedette était partie retrouver ses parents sans que rien n'explique son retrait.
Daniela se présente comme le début d'un texte autobiographique d'une narratrice née en 1915, au caractère très affirmé. Le récit commence par la perte de la virginité de la narratrice à l'âge de treize ans et s'arrête quelques mois plus tard.
Bronzage a pour narrateur un personnage « people », on ne sait si actrice, danseuse, journaliste de télévision, tout cela à la fois. Elle a adopté le temps d'un mois une petite fille du Tiers Monde, qu'elle doit renvoyer dans son pays, ce qui la peine, mais sa carrière se poursuit en même temps que ses amours et, les mois passant, elle doit de nouveau adopter pendant l'été une autre petite fille. Le provocateur suit pendant quelques jours la vie d'un jeune artiste au moment de la guerre d'Irak, en 2003, qui décide d'aller manifester avec une pancarte antisémite.