Parages des voies mortes

Parage des voies mortes est le deuxième volume de la dernière trilogie composée par Burroughs. Publié pour la première fois en 1983, il fait suite aux Cités de la nuit écarlate et précède les Terres occidentales. Ce volume suit les pas d'un jeune aventurier dans l'Ouest américain (le motif des armes à feux, bien connu de Burroughs lui-même, est particulièrement présent). Le récit non linéaire confère une structure labyrinthique à la narration, ménageant de nombreux allers-retours entre passé et présent. Le roman est encadré et structuré par un schéma simple, celui du western, qui est lui-même une des formes qu'emprunte pour se raconter le grand Rêve américain de conquête et de traversée. Il s'ouvre - et se termine - le 17 septembre 1899 dans le Colorado, en plein cimetière de Boulder, par un règlement de comptes où les deux protagonistes seront tués. Ce duel est prétexte à une série de retours en arrière et d'aventures. Parage des voies mortes est un roman d'aventure, d'anticipation basé sur des faits précis, une rétroaction du mouvement, du rythme dans les espaces-temps fantasmagoriques de la science-fiction. A la poursuite du mensonge de la bêtise archiconservatrice d'un Vieux Bickford (terres, bétail, pétrole), d'un Hart (magnat de la presse) ou du colonel Sutton Smith, qui ressemble étrangement au légendaire pistolero Kit Carsons et à Burroughs lui-même, il nous familiarise avec sa théorie et sa pratique de l'Elimination à la tête des camés salvateurs... De Clear Creek à Fort Johnson, du sud du Colorado au nord du Nouveau Mexique, de Londres à Paris, ces modernes seigneurs de la guerre, ces dieux des Terreurs paniques, du Trou noir, traduisent l'envergure du Sphinx Burroughs/Carsons résumé sous le titre d'un livre, Quien es, qui sera aussi la dernière parole de Kim. « Les scènes sont rapides et sobres, les personnages multiples et spasmodiques. Le bizarre avoisine le louche, l'ambigu côtoie le marginal, le sens coexiste avec le non-sens, le labyrinthe opère en cercle. Kim Carsons, le narrateur (presque un double de Burroughs), existe-t-il ? Si oui, qui est-il ? Cette lancinante question se pose à chaque page, comme pour nous déconcerter. Narquois, l'auteur se déguise sous la luxuriante apparence du verbe, en même temps qu'il explore pour notre inconfort les zones psychiques les plus interdites. » (Patrick Serex, 24 Heures) « " Qui est-ce ? " Il semble que Burroughs pose cette question non seulement à tous ses personnages mais à toutes ses phrases, à tous ces mots. Chacun a la possibilité de se déguiser, de changer, et c'est l'une des raisons pourquoi Parage des voies mortes est à tout point de vue excitant. C'est pourquoi aussi le roman peut se terminer comme il commence, à un rien près, un rien qui est burroughsien en diable. » (Mathieu Lindon, Libération)