Mac et son contretemps
Le narrateur du roman d'Enrique Vila-Matas, Mac et son contretemps, sorte de double lointain et parfois pulvérisé de l'auteur, est un homme de plus de soixante ans qui veut « se lancer » dans l'écriture littéraire. Il se présente donc comme un écrivain débutant, ancien chef d'entreprise d'une société de construction qui a fait faillite alors qu'on apprend en cours de lecture qu'il a en fait été congédié d'un cabinet d'avocats car il ne correspondait pas aux critères désormais en vigueur.
Il fait ses gammes en tenant un journal secret, il aspire à une carrière littéraire à ses yeux plus conséquente et se pose diverses questions qui ont à voir avec les genres littéraires et l'histoire de la littérature. Parmi ses projets, il envisage de réécrire un roman de son voisin Sánchez qui doit beaucoup à l'une des premières oeuvres d'Enrique Vila-Matas, Une maison pour tous.
Le roman prend un tour nouveau quand l'écrivain débutant découvre que ce Sánchez a peut-être été et, est encore, l'amant de sa femme irascible, Carmen. Dès lors, deux univers se juxtaposent, celui des grands thèmes littéraires et celui, plus trivial, des amours supposées de son épouse. Les deux univers n'avancent plus parallèlement, mais se parlent, donnent au roman un tour comique irrésistible. Comment peut-on penser à de telles hauteurs et réagir comme un mari de comédie italienne dans un roman ? Telle est la principale surprise du roman, qui ne se contente pas de brasser les thèmes connus de l'oeuvre d'Enrique Vila-Matas mais les confronte à leur envers comique pour aboutir à une oeuvre légère, gracieuse, enivrante comme du champagne.