L'Ecole d'impiété

Auteur : Alexandre Tisma
Editeur : Serpent à plumes (Le)

Aleksandar Tisma est né en 1924. Il est mort en 2003 à Novi Sad, Voïvodine (Serbie-Monténégro). Tisma a combattu les occupants allemands et hongrois aux côtés de Tito en 1944-1945. Plus tard, il a pris position contre Milosevic et a du quitter son pays, trouvant refuge en France dans les années 90. Il a vécu en Champagne-Ardennes jusqu'à la chute du dictateur et son retour à Novi Sad en 2000. Novi Sad, où a vécu l'auteur, est tristement célèbre en raison du pogrom du 21 au 23 janvier 1942 au cours duquel plus le 14.000 juifs ainsi que 500 Serbes perdirent la vie. L'histoire de cette ville au bord du Danube a inspiré l'oeuvre de Tisma qui a publié des poèmes, des nouvelles et trois romans.
Dans L'Usage de l'homme, Tisma dépeint le tableau vivant d'une petite communauté multinationale de Novi Sad emportée et détruite pendant les années fascistes. Avec Le Kapo, portrait d'un jeune juif devenu l'instrument des exterminateurs, Tisma analyse les comportements sauvages de l'homme corrompu par la terreur et la couardise. Toute situation paroxystique permet un dévoilement de la nature humaine, dont on peut se détourner par un réflexe de sensibilité, mais dont il est difficile de nier l'importance. A ce titre, les récits de guerre portent comme des stigmates cette révélation des conduites humaines et les quatre nouvelles d'Aleksandar Tisma proposées ici pourraient illustrer cette incontestable forme de connaissance des abysses psychologiques de l'homme, lorsque, tel un rat, il se trouve pris dans les rets de l'histoire et qu'il doit inventer son comportement, sa morale, hors de toute référence habituelle. Les quatre nouvelles de Tisma paraîtront à certains insoutenables et il serait bien léger de faire le procès d'un rejet tout à fait digne de respect. Qu'il soit difficile de se tenir debout à côté d'un bourreau, lié comme dans l'étau d'un accouplement monstrueux avec sa victime torturée, relève de l'évidence. Et, peut-être serait-il même plus aisé de justifier ce détournement de la tête, que de rester là, comme fasciné par le spectacle de ces ignominies humaines. Et pourtant ? Peut-on dire qu'on n'apprenne rien sur l'homme et sur tous les hommes ? De l'Histoire et de toutes les histoires, bien au-delà des horreurs de la dernière guerre mondiale, dans le champ circonstancié de la Yougoslavie occupé, violée, mutilée, déchirée, écartelée ? Il n'y a pas que la guerre dans ces nouvelles, même si, partout et soudain, elle surgit en filigrane. Il y a surtout ces hommes et ces femmes en situation violente de choix, comme ce malheureux père qui fixe hébété toute une nuit son réveil, sachant que selon toute vraisemblance sa famille sera anéantie au matin. Que doit-il faire ? Que peut-on faire ? Que doit-on faire ? Tuer sa femme, son enfant pendant leur sommeil ? Fuir, comme ces bêtes traquées que les chasseurs contemplent, dans leur inutile espoir, un sourire de supériorité aux lèvres ? Rester là, cloués sur place, dans une passivité soumise à toutes les fatalités ? Terrible monologue intérieur de cet homme face à "sa" vérité absolue, monstrueuse, à laquelle il n'est pas question de se soustraire. Ces quatre récits prendront immédiatement place parmi les témoignages les plus terribles qu'ait inspiré la seconde guerre mondiale. Seul un très grand écrivain pouvait nous restituer ce champ clos des consciences torturées et nous amener sur le plateau de la littérature ces quelques minutes bouleversantes de vérité humaine toute nue et toute crue.

7,10 €
Parution : Février 2007
Format: Poche
216 pages
ISBN : 978-2-2680-6128-3
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