Le salon des incurables
Le Salon des incurables est un recueil de douze nouvelles disparates par leurs thèmes, les lieux qu'elles traversent et le choix narratif adopté. Mais si elles ne sont reliées par aucun personnage récurrent, ni par un quelconque message délivré, elles constituent une galerie énergique de portraits tous plus effrayants et drôles les uns que les autres qui dévoilent une humanité se contorsionnant comme un clown, en proie à ses peurs, ses angoisses, sa folie et sa cruauté.
En effet quel lien peut-on trouver entre Avelino Armisén, un vieux garçon malheureux dont la confession à sa mère de sa masturbation a un effet inattendu et ce nigaud de Boni qui se sert d'un accidenté de la route pour nourrir sa création littéraire, ou encore entre Sonia Pereda, une respectable prof d'université, dont l'obsession pour ses mains pourries confine au grotesque et ce mari de 15 cm de moins que sa femme parti spéculer au très select Salon des Incurables sur la mort prochaine du mari de la voisine, atteint d'un cancer ?
Que peuvent avoir en commun Silas, un patient abandonné dans un hôpital désert, et Coco, un grand gaillard crasseux, persuadé d'avoir trouvé la femme de sa vie, trop belle pour lui ?
Rien, si ce n'est une alchimie secrète tissant ces destins de funambules, toujours en équilibre sur le fil d'une vie qui éveille les mauvaises consciences individuelles et collectives.
Ainsi ces récits orchestrent magistralement un humour noir, voire un cynisme savamment dosé avec une délicieuse amoralité qui tient en haleine le lecteur rendu témoin de la comédie et du ridicule universels. Il suffit de quelques mots pour que le rire spontané et cruel d'un enfant témoin de la chute d'un vieillard parvienne à transgresser le politiquement correct.